Rencontrer la Révolution française au détour d'un chemin, au coin d'un champ, au fond d'un bois : c'est encore possible aujourd'hui, deux cents ans après les événements qui ont si profondément marqué la Bretagne et ses marges du Maine et de l'Anjou. Des tombes de victimes, le plus souvent anonymes et en pleine nature, sont encore régulièrement visitées et entretenues, et l'on y vient prier et déposer des ex-voto. Issus de l'un et l'autre camp, Bleus ou Blancs, hommes ou femmes, soldats, prêtres, paysans, leur statut de martyrs dans la conscience populaire semble transcender les sanglants clivages de jadis. Le phénomène atteste la transmission, au long des générations, d'une mémoire orale, d'une sorte d'archive spontanée. Il révèle aussi la persistance, aux marges de la modernité, d'un commerce familier avec la mort et les morts.